REX et données subjectives: quel système d’information pour la gestion des risques?
Description:... Le retour d’expérience est conçu, dans une vision classique, comme une démarche de gestion mettant à disposition les informations nécessaires aux managers pour piloter les systèmes et gérer les risques. Malheureusement, la réalité est moins simple. Les systèmes à piloter sont des systèmes socio-techniques complexes. Le futur n’est pas déterminé par le passé. Il s’avère nécessaire de compléter le système d’information supportant la gestion des risques.
Le travail présenté propose de passer d’un système fondé sur des informations extraites des expériences incidentelles du système à piloter, vers un système d’information qui intègre au mieux l’expérience des gens qui le font fonctionner. Les connaissances tacites de ces personnes expérimentées doivent alors être élicitées. Le présent travail a permis d’expérimenter au sein de la SNCF une technique d’aide à la décision issue du courant de l’analyse de la décision. Cette technique de MAUT a été appliquée à l’analyse d’un changement de réglementation concernant la conduite des trains en cas d’alerte radio. Les décisions sont traitées ici non sous un angle individuel, mais comme l’aboutissement d’un processus construit au sein d’une organisation, mettant en jeu plusieurs décideurs et plusieurs enjeux (pouvant être partiellement contradictoires). L’apport de cette technique par rapport aux méthodes classiques basées sur les arbres de défaillance est discuté.
Un second niveau d’étude de l’impact de cet éventuel changement réglementaire a consisté à analyser en profondeur les raisonnements et les connaissances utilisés par les acteurs pour construire le sens de leur action en cas d’alerte radio. En modélisant les discussions entre les différents acteurs impliqués et en restituant leur point de vue en situation, il est possible d’identifier les divergences éventuelles entre les représentations de différents acteurs concernant une même situation, ainsi qu’un possible écart entre les croyances des concepteurs et les utilisateurs de la règle. Cette seconde analyse s’appuie sur une théorie de la conception dite C/K, qui met en relation les connaissances et les concepts utilisés en situation.
L’auteur suggère que l’application de ces méthodes permet de voir l’analyse de risques comme un lieu d’élaboration de sens collectif sur la sécurité du système, plutôt que (dans une vision plus positiviste de la connaissance) comme une activité qui révèle et approche la vérité sur les risques, en s’appuyant sur des données factuelles et objectives. Elle propose de développer l’ingénierie du subjectif pour permettre la construction d’un système de management au sein duquel la vision d’ingénieur de la gestion des risques et la vision inspirée des courants des sciences humaines et sociales pourront cohabiter.
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